Alcool au travail : EDF fait le choix de la sobriété

26/11/2025

A partir de l’année prochaine, les salariés d’EDF ne pourront plus consommer une goutte d’alcool dans le cadre de leur travail. Une décision motivée par un enjeu de santé publique, alors que les addictions deviennent un risque de plus en plus prégnant pour les entreprises.

EDF impose la sobriété à ses équipes. A partir du 1er janvier 2026, les salariés de l’énergéticien ne pourront plus consommer d’alcool sur leur lieu de travail, qu’il s’agisse d’un événement professionnel, d’un repas entre collègues ou d’un pot de départ. En septembre dernier, l’entreprise a en effet annoncé interdire purement et simplement la consommation de boissons alcoolisées à l’ensemble du groupe, filiales comprises.

Cette politique inédite, initiée par le nouveau PDG d’EDF, Bernard Fontana, et validée par le comité exécutif de l’entreprise, aurait pour objectif de répondre à des enjeux de "santé publique" et d’"exemplarité managériale", rapporte le média Politico. La notion d’"équité" serait également évoquée, la consommation d’alcool étant déjà prohibée pour des raisons de sécurité sur certains sites industriels, comme les centrales nucléaires.

Concrètement, l’alcool sera exclu de tous les événements internes organisés par EDF. La mesure s’appliquera également aux événements extérieurs, comme les salons auxquels participe l’énergéticien. Les boissons avec alcool ne seront en outre plus remboursées sur les notes de frais des salariés. La seule exception concernera les évènements "associant des parties prenantes externes" où l’alcool pourra être autorisé par un membre du comité exécutif, "avec modération" détaille la note consultée par Politico.

"Débanaliser la consommation d'alcool"

EDF va ainsi plus loin que ce que prévoit la loi. Bien que le code du travail proscrive la présence d’alcool "fort" sur le lieu de travail, il fait exception du vin, de la bière, du cidre et du poiré. Il autorise néanmoins les entreprises à davantage encadrer, ou supprimer, la possibilité de consommer ces boissons par le biais de son règlement intérieur. C’est le cas de certaines sociétés qui auraient d’ores et déjà pris des décisions similaires pour une partie de leurs sites et filiales, comme Renault ou Bouygues Construction.

"EDF a beaucoup travaillé sur ce risque-là, qui est encore tabou. Cette mesure permet de débanaliser la consommation d'alcool, qui représente plus de 40 000 morts par an en France", analyse pour Novethic Hervé Martini, secrétaire général de l’association Addictions France et médecin du travail. Risque accru d’accidents, perte de productivité, facteur de violence ou encore de désinsertion professionnelle… La présence d’alcool au sein des entreprises n’est pas sans conséquence. "Instituer une politique de la consommation provoque à la fois des dégâts aigus, accidentogènes notamment, mais aussi des dégâts chroniques", précise Hervé Martini.

5,3% des salariés positifs à l’alcool

Si la santé des salariés est une priorité partagée par la CFE-CGC, syndicat majoritaire d’EDF, cette dernière insiste sur l’impact des conditions de travail pesant sur une partie des effectifs. "Bernard Fontana, notre PDG nommé en mai, a mis en place un plan visant à réaliser un milliard d'euros d'économies d'ici à 2030. Résultat, certaines équipes sont sous pression", explique aux Echos Amélie Henri, déléguée syndicale centrale CFE-CGC. "On considère souvent que c'est un comportement qui est personnel et n'a rien à voir avec l'entreprise. Or, pour avoir une démarche globale il faut aussi s'intéresser aux conditions de travail. Qu'est-ce qui pousse les salariés à consommer de l'alcool dans le cadre de leur travail ?", note Hervé Martini.

De son côté, Gwénaël Plagne, secrétaire du CSE central d’EDF (CGT), interrogé par Politico, estime que l’alcool est "déjà bien réglementé" au sein du groupe. Son interdiction s’inscrirait, selon lui, dans la lignée d’une "politique toujours plus répressive menée par la direction".

Reste que l’alcool représente un risque de plus en plus pris en compte, en particulier par les grands groupes, notamment au travers de leurs politiques RSE. D’après une étude réalisée en entreprise et publiée par Aperli, société spécialisée dans la prévention des addictions, près de 5,3% des travailleurs auraient été testés positifs à l’alcool et aux stupéfiants en 2024, contre 2,55% en 2017, soit une augmentation de 107% en huit ans. L’alcool serait par ailleurs responsable de 10 à 20% des accidents du travail, selon l'Institut national de recherche et de sécurité.

Source : novethic.fr